lundi 9 décembre 2019

Bye Bye 2019, sous les crayons de Côté et Ygreck

Judith Desmeules sur le site du Soleil.


L’environnement et Greta, Catherine Dorion et ses vêtements, Justin Trudeau et ses costumes, Régis Labeaume et son tramway… l’actualité 2019 a été riche et elle a assurément inspiré de drôles et puissants dessins aux caricaturistes de la région de Québec.

André-Philippe Côté, qui signe les caricatures du journal Le Soleil, et Yannick Lemay alias Ygreck, qui publie dans le Journal de Québec, ont présenté leur revue de l’année en caricatures samedi, au Musée de la civilisation.

Plus de 150 personnes ont assisté à cette l’activité publique organisée chaque année par la section Québec de la Fédération professionnelle des journalistes (FPJQ) et animée par Catherine Lachaussée de Radio-Canada.

L’ex-chroniqueur devenu chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet, a bien joué son rôle de commentateur. La grande majorité des dessins porte sur les débats de l’actualité, qui sont bien souvent politiques. 

Et avec le nouveau gouvernement caquiste tout juste formé puis les élections fédérales, les têtes politiques ont occupé beaucoup de place dans les médias.

«Je fais attention pour ne pas dépeindre les politiciens. Il y a un climat de cynisme sur la politique que je n’aime pas, il s’est installé avec les réseaux sociaux», évoque Côté.

Du côté de Ygreck, on avoue qu’il «les protège un peu moins». D’ailleurs, il a dû encaisser les commentaires de M. Blanchet, qui ne se gênait pas pour pointer les caricatures de lui qu’il avait moins aimées, toujours sur un ton humoristique.


«Pourquoi tu me dessines comme si je mesurais 4 pieds 2?»

«Mon nez n’est pas si gros que ça!»

M. Blanchet a su rire de lui-même, plusieurs des caricatures choisies le mettaient en vedette, en partant de son intérêt pour la chefferie du Bloc jusqu’à ses élections réussies sur toute la ligne. Il a aussi félicité la créativité des caricaturistes à plusieurs reprises.

«On a beau bougonner, on a hâte d’être en caricature. C’est la consécration de notre existence politique», avoue-t-il.

Le chef du Bloc restait toutefois prudent dans ses commentaires politiques. Même que, lorsque ses interventions étaient teintées de partisanerie, il avertissait le public.


Sujets facilement utilisables

«Catherine Dorion, c’était un cadeau!» a lancé Ygreck lorsque la première caricature affichant la députée de Taschereau est apparue. Même si toute l’histoire de sa tuque, de son poil ou du coton ouaté fait bien rire, la situation cache un enjeu important.


«Il faut que tu te mettes en scène [en politique], les gens ne sont pas obligés de voter pour toi. Le risque, c’est que la mise en scène mange le fond. C’est assurément une femme avec de brillantes idées, mais la mise en scène a dévoré le contenu», laisse savoir M. Blanchet.


Un autre cadeau? La jeune Greta Thunberg.

«C’était l’année de l’environnement, je n’ai jamais utilisé autant de vert dans ma gamme de couleurs», se souvient Ygreck. 


Lui et Côté sont certains que la jeune militante et sa mission reviendront vite dans leurs dessins. Ils prennent d’ailleurs un malin plaisir à l’ajouter dans leurs concepts.

Les défauts des CHSLD et le troisième lien sont d’autres sujets loin d’être clos. Dans ces cas-là, 2019 n’était que le début.


Il y a aussi le psychologue de Côté — le docteur Smog — qui revient à plusieurs reprises dans l’année, que ce soit un François Legault collé au plafond, trop heureux des sondages, ou un Justin Trudeau qui ne sait plus qui il est à force de se déguiser.

Les caricaturistes ont d’ailleurs des milliers d’esquisses dans leurs archives, qui n’ont jamais été publiées. Chaque matin, ils en proposent quelques-unes, et celles qui ne sont pas retenues restent cachées.

M. Blanchet a même avoué qu’il aimerait mettre la main sur quelques-unes de ces esquisses pour les avoir dans son bureau à Ottawa, question de rire un peu.

Absent ou trop présent

On a pu noter quelques personnages absents de la revue de l’année, tels que Andrew Scheer ou Donald Trump, comparativement à la grande place qu’ils ont prise dans les médias.

«Ça prend du tempérament, ça doit bouger un peu, [Scheer] il bouge pas, il est dur à dessiner», croit Ygreck.

Et pour Trump, le caricaturiste est tout simplement «blasé» de le dessiner. Chaque fois, le sujet génère de la haine, les mauvais commentaires sur le personnage fusent de partout, ce qui n’est pas agréable.

«Il est très présent, partout. Il est une caricature lui-même, ça devient difficile. Il en fait tellement des déclarations bizarres. Je me retiens des fois, on ne peut pas tout le temps le faire», ajoute Côté.

La chute du Parti québécois, l’état des routes, la fameuse neige québécoise, Desjardins et ses problèmes de sécurité, SNC-Lavalin, la Loi sur la laïcité de l'État, le prix des stationnements des hôpitaux, les traversiers défectueux…

Tous des sujets qui ont inspiré les caricaturistes de Québec en 2019. Ils avaient de quoi s’amuser.

Un autre est l’avenir des médias. Ce sujet a d’ailleurs particulièrement touché Côté, qui a utilisé sa tribune le temps d’un jour pour faire hommage au Soleil, en une caricature plus personnelle. 

  

«C’est une institution fondamentale, je voulais montrer mon côté émotif pour Le Soleil. Montrer à quel point j’avais un attachement pour le journal», souligne-t-il.

D’ailleurs, M. Blanchet s’est vite rangé de son côté. «La bataille que ces artisans mènent […] je la trouve exemplaire.»

L’impact des dessins

L’impact des caricatures sur un sujet est dur à mesurer, mais les trois invités de samedi croient que ces dessins participent à l’évolution des pensées dans le temps.

«Le phénomène est extrêmement important, l’illustration interpelle les gens. Ça accroche le regard. Ça suscite une forme de réflexion, ça a un impact, elle peut contribuer à ton apparition politique, confirmer ton existence politique. Ça a un impact significatif, on le sait», insiste le chef du Bloc.

Le nombre de caricaturistes a dangereusement diminué dans les dernières années. Un curieux spectateur a d’ailleurs demandé aux invités ce qu’ils pensaient du futur du métier.

«C’est lié à l’avenir des journaux, c’est comme une plante, pour pousser, ça a besoin d’un journal. Avant, chaque quotidien avait son caricaturiste. Maintenant, au lieu d’être associé à un journal, tu ne sais pas où tu vas être publié», croit Côté

«C’est un besoin naturel d’information, pour ramener l’information proche de nous. […] Ce n’est pas rose pour le moment, on est en changements, mais je suis optimiste», ajoute Ygreck.

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