mardi 26 décembre 2017

2017 vue par Chappatte

Sur le site de Courrier international.


Le cartooniste suisse Patrick Chappatte collabore avec Le Temps, die Neue Zürcher Zeitung, The New York Times… et Courrier international.

Il a répondu à nos questions.

Quel est le thème de l’année selon vous ?

Alors, réfléchissons… Trump, Trump, mais aussi Trump !

Je collabore notamment avec l’International New York Times, et même si j’ai bien sûr travaillé sur d’autres thèmes, Donald Trump a représenté la majeure partie de mon travail cette année.

Il y a bien sûr eu l’apparition de nouvelles figures, mais que l’on parle de Kim Jong-un ou de Harvey Weinstein, on en revient toujours à Trump.

Ce président tonitruant, omniprésent, c’est une aubaine ou une malédiction pour un dessinateur ?

Les deux en fait. On nous dit souvent : “Croquer un tel homme, c’est du gâteau.” C’est vrai sur le plan physique, il a des caractéristiques reconnaissables : sa chevelure évidemment, ses mains minuscules, sa grande cravate rouge.

Mais en fait il n’est pas si simple de caricaturer une caricature. D’une manière générale, les populistes ne sont pas des cibles faciles pour la satire, parce que ce sont des cibles mouvantes. 

Et Donald Trump répond parfaitement à cette définition : il bouge sans cesse, impose son rythme, et a toujours un coup d’avance sur l’indignation. 

Il nous prend de court, nous les dessinateurs, et tôt ou tard il finit par ressembler à la caricature que l’on en fait. 


Il est arrivé que je m’empare d’un sujet le matin, que j’imagine ce que le président pourrait faire pour aller plus loin, et que, au moment d’envoyer le dessin le soir, il soit déjà dépassé. C’est vertigineux ! 

Un ouragan permanent, une catastrophe naturelle ! Le job était beaucoup plus simple avec Obama.

Cette omniprésence a un autre effet beaucoup plus pernicieux à l’échelle de la politique américaine. Donald Trump, avec cette obsession permanente de faire parler de lui, occupe tout l’espace médiatique. Il pompe tout l’oxygène de l’actualité. 

Et il laisse le champ libre aux républicains, qui font passer des mesures inimaginables, dissimulées derrière l’agitation provoquée par le président.

Vous êtes en overdose ?

En quelque sorte. Mais dessiner Trump est aussi irrésistible. Et les gens ont besoin de faire sens de ses absurdités. 

C’est justement parce que Donald Trump déforme tout, parce qu’il navigue dans une réalité “alternative” que nous avons un rôle à jouer. 

La qualité de la satire consiste à montrer les choses telles qu’elles sont. Et montrer Trump tel qu’il est fait du bien au dessinateur comme aux lecteurs.


Dans quelles situations préférez-vous le dépeindre ?

Je suis toujours intéressé quand il rencontre les grands de ce monde : Poutine, Merkel, le pape… 

On peut alors le comparer à ses interlocuteurs et prendre la mesure de son arrogance. On voit alors apparaître un Trump pataud, un personnage ubuesque, fantasque, désorienté.



Y a-t-il une actualité que vous regrettez de n’avoir pas traitée cette année ?

Les Rohingyas. J’ai fait plusieurs dessins, que j’ai proposés à la rédaction. Mais à chaque fois ils étaient en concurrence avec un dessin sur Trump, qui faisait encore une fois l’actualité. Et aucun n’a été retenu.

Propos recueillis par Virginie Lepetit

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