mardi 25 juin 2019

António défend son dessin

Sur le site de Libération.


Son dessin de Trump et Nétanyahou, repris par le New York Times a précipité la fin des caricatures dans le journal. António Antunes a répondu aux questions de Libé.

Très connu dans son pays, le Portugais Antonio Antunes publie des dessins dans la presse portugaise depuis près de quarante-cinq ans. Avec sa caricature reprise par le New York Times, l’un des deux fondateurs du World Press Cartoon a déclenché une tempête internationale.

Dans quel contexte a été réalisé votre dessin ?

Mon dessin a été publié d’abord dans mon journal portugais, Expresso, sans susciter aucun problème. J’ai une relation de confiance avec cette rédaction. Ils savent très bien que je ne suis pas antisémite.

Dans l’édition du New York Times qui l’a racheté, le titre a été oublié : «La Pax canine.» C’est une allusion et une critique de la continuation de la politique d’annexion israélienne du gouvernement de Nétanyahou et du changement de capitale, tout ça avec l’aide de Trump.

Comprenez-vous que ce dessin puisse être perçu comme antisémite ?

J’ai lu ça, mais je ne suis pas d’accord. Il y a différents arguments. L’étoile de David, c’est un symbole sacré de la religion, mais c’est en même temps un symbole politique.

Les Israéliens ont choisi l’étoile de David comme élement de leur drapeau. La couleur bleue mise dans mon dessin, c’est celle du drapeau. 

Deuxième argument : la kippa. Quand Trump a été à Jérusalem, il a mis une kippa. J’ai mis une kippa sur sa tête, mais il a été le premier à le faire. 


Troisième point : le chien. Un cartoon raconte une histoire : là, celle d’un aveugle conduit par un chien guide. Pourquoi un chien ? Les aveugles ne sont pas guidés par des vaches ou des chevaux. 

Pour moi, c’est un cartoon antisioniste, pas antisémite. Beaucoup de gens se trompent et notamment Trump.

Comment vous situez-vous politiquement ?

Je suis un défenseur de la démocratie libérale, je ne connais pas de meilleur modèle. Et je déteste la dictature, tous les types de dictatures. Que les choses soient claires : je n’ai rien contre les juifs. La caricature est contre la politique du gouvernement de monsieur Nétanyahou.

Avez-vous reçu des menaces ?

Quelques menaces et beaucoup d’insultes. J’ai reçu une belle collection de «cartooniste nazi antisémite de merde», c’est assez extraordinaire. Mais j’ai bonne conscience : je sais pourquoi j’ai fait ce dessin, je ne culpabilise pas.

C’est un cartoon parmi d’autres pour moi, comme j’ai fait des dessins contre Daech, contre Trump, contre Poutine, etc.



Aviez-vous déjà eu des problèmes avec d’autres caricatures ?

Oui, parfois. Au Portugal, avec l’Eglise catholique, une polémique était montée jusqu’au Parlement. J’avais dessiné une capote sur le nez de Jean-Paul II, parce qu’il prônait de ne pas mettre des préservatifs au moment de l’épidémie du sida. 

Ce que je jugeais irresponsable. En 1983, une grosse pression avait été mise, sans succès, pour que je ne reçoive pas un grand prix de presse à Montréal pour un pastiche d’une photo célèbre du ghetto de Varsovie.


J’avais remplacé sur mon dessin les Allemands par des militaires israéliens et les enfants juifs par des petits Palestiniens. Le Jerusalem Post a ressorti ce dessin pour dire que je suis antisémite depuis longtemps. 

Mais ce cartoon avait été publié pour parler du massacre de Sabra et Chatila. Je n’aime pas les massacres, c’est mon problème.

Quentin Girard

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