Sur le site du Salon.
Le 35e Salon International de la Caricature, du Dessin de presse et d'Humour de St. Just-le-Martel présentera, du 1er au 9 octobre, une exposition de dessins tirés du livre Cabu s’est échappé.
Ce nouveau livre consiste en 1000 dessins qui ont été publiés dans la rubrique « Les couvertures auxquelles vous avez échappé » dans Charlie Hebdo entre 1969 et 2015. Beaucoup sont des inédits et tous sont des reproductions des originaux conservés dans les archives de Cabu.
Faut-il le rappeler, Cabu était un fidèle de Saint Just, où il était venu dès la seconde édition, plusieurs fois ensuite. Il avait grandement contribué à la réussite de cette manifestation, par sa présence bien sûr, par son immense talent, mais aussi en nous facilitant les contacts avec nombre de ses collègues.
AJOUTS
L'avant-propos de Riss:
Chaque semaine, les dessinateurs de Charlie Hebdo consacrent la journée du lundi à la réalisation et au choix du dessin qui sera ensuite mis en couverture du journal. Le lundi, c’est un peu comme le trapéziste qui, sous le toit du chapiteau de son cirque, lâche d’un seul coup le manche de son trapèze, se retrouve dans le vide pendant quelques secondes, et espère que ses mains rencontreront celles de son copain assis sur le trapèze d’en face pour s’y accrocher in extremis et éviter de s’écraser vingt mètres plus bas. La réalisation de la « une » ressemble à ce petit numéro de cirque dont on ne connaît jamais l’issue.
C’est ce qui est excitant, c’est aussi un peu angoissant. Une angoisse qui revient chaque semaine. On arrive le matin au journal, parfois avec des idées, parfois avec zéro idée. C’est seulement en étant tous assis autour de la table, en discutant, en disant n’importe quoi, en riant de tout et de rien, en réfléchissant un peu quand même, qu’on peut soudainement prendre une feuille A4 pour y retranscrire avec un crayon et de l’encre ce qui nous a le plus fait rire et réagir au cours des derniers jours. Il n’y a pas de recette miracle pour inventer une couverture, sinon d’accepter de jouer ce jeu-là.
Pendant des années, tous les lundis, Cabu a été présent à la table de la salle de rédaction. Sa place était toujours la même, facile à identifier puisqu’à l’endroit où il s’asseyait, les traits noirs de ses feutres avaient traversé les feuilles et s’étaient incrustés dans le bois de la table. L’odeur de ses feutres était si forte qu’on la sentait jusqu’à l’autre bout du bureau.
Cabu avait toujours un petit carton à dessins qu’il sortait de sa musette, posait sur ses genoux, entrouvrait et duquel il sortait des feuilles pliées en deux où il avait noté des informations glanées dans les médias durant la semaine écoulée, ainsi que les idées qu’elles lui avaient suggérées.
Quand on était un peu à sec, on se tournait vers Cabu pour lui demander s’il n’avait pas dans sa musette magique des trucs qu’il avait repérés, qui nous avaient échappé, et qui auraient pu nous inspirer une « bonne » couverture. Car Cabu était à la fois un formidable dessinateur et un vrai journaliste.
Toujours à l’affût, non pas de l’information la plus tapageuse, mais de celle qui fait réagir et réfléchir. Cabu avait l’œil, pour réaliser ses caricatures inégalées, mais aussi pour poser les bonnes questions et anticiper les problèmes de demain avant les autres.
Il avait un jour réalisé un grand dessin avec plusieurs personnages de la scène internationale. Parmi eux se trouvait la silhouette longiligne d’un type inconnu doté d’une grande barbe. De manière inhabituelle, on ne reconnaissait pas cette caricature.
Ce n’est que quelques mois plus tard qu’on en découvrit l’identité : Cabu avait, avant tous les autres, dessiné Ben Laden. Bien avant le 11 septembre 2001, il avait déjà repéré ce type et eu l’intuition qu’il allait, tôt ou tard, faire de nouveau parler de lui.
Dessinateur de presse, c’est un métier d’artisan. Il faut un crayon, de l’encre, une plume ou un pinceau, une gomme, un tube de gouache blanche, un tube de colle et une paire de ciseaux. C’étaient là les seuls outils de travail de Cabu.
Quand un de ses dessins était choisi pour faire la « une », il lui fallait ajuster son dessin original au format du journal. Alors Cabu sortait ses ciseaux, son tube de colle, coupait, collait, recoupait et recollait. Il nettoyait les traits parasites avec son tube de gouache blanche.
Puis il appliquait un dernier coup de gomme en prenant garde de ne pas arracher ses collages encore frais. Et après avoir demandé aux autres dessinateurs ce qu’ils pensaient du résultat final, et obtenu leur avis favorable, il s’en allait rejoindre les maquettistes, auxquels il confiait son dessin en leur disant : « Attention, ce n’est pas encore sec. »
Quant aux dessins qui n’avaient pas été sélectionnés, ils auraient dû en principe partir à la poubelle. Mais, depuis toujours, la tradition veut qu’on en sauve quelques-uns en les publiant sous le titre « Les couvertures auxquelles vous avez échappé ». Pour faire vite, on les appelle « les échappées ».
Des « échappées », Cabu en a réalisé des milliers. Beaucoup ont fait la « une » de Charlie Hebdo, certaines ont été publiées dans les pages intérieures du journal, d’autres sont retournées dans sa musette et n’ont plus jamais été vues par personne.
À travers un millier de dessins, cet ouvrage vous invite à redécouvrir les « échappées » de Cabu, et donne la mesure de son imagination infinie, de ses convictions politiques et de son humour éternel.
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