samedi 22 mai 2021

Bado: 40 ans de coups de crayon

 Mario Boulianne sur le site du Droit.


Guy Badeaux a toujours posé un regard unique sur l’actualité. Et depuis 40 ans, il le fait dans les pages du journal Le Droit.
Le caricaturiste, mieux connu sous le pseudonyme de Bado, qui vient de fêter ses 72 ans s’est installé devant la table à dessin du quotidien franco-ontarien en 1981.

À cette époque, Le Droit était dirigé par l’éditeur Pierre Tremblay et le Parti québécois venait de remporter ses élections pour un deuxième mandat.

« C’était une période très intéressante pour un caricaturiste, confie le dessinateur. En prenant la relève de Daniel McKale, je savais que j’avais aussi de gros souliers à chausser, mais je me sentais prêt à relever ce défi au quotidien. »

Et comme premier dessin, Bado avait alors décidé de faire un autoportrait avec comme légende : « Excusez mon retard, je pratiquais ma signature ».

« Il fallait bien que je me présente aux lecteurs », lance-t-il avec un sourire en coin.


Long parcours

Mais, la carrière de Bado n’a pas débuté au Droit, loin de là.

Originaire de Saint-Sauveur, dans les Laurentides, mais qui a grandi à Montréal, Bado a publié pour la première fois dans le Montreal Star, un journal anglophone de la métropole.

« Avant de me retrouver dans les grands quotidiens, j’ai fait mes classes dans le journal étudiant du Cégep du Vieux-Montréal, se rappelle-t-il. À ma sortie de l’école, j’ai obtenu quelques contrats, ici et là, dont un avec L’Oréal. Celui-là, je ne me l’explique toujours pas (rires)… »

À l’automne de 1971, le jeune Bado s’envole pour l’Europe où il croisera le chemin de nombreux dessinateurs de renom dont Fred, le créateur de Philémon, un des fondateurs de Hara-Kiri et collaborateur à la revue Pilote.

À son retour au pays, il déniche un emploi au Montreal Gazette puis au Devoir alors dirigé par Claude Ryan, où il est supervisé par un jeune journaliste, Robert Guy Scully.

« C’est une époque où je me suis beaucoup cherché et où j’ai butiné d’un journal à l’autre, explique-t-il. Je suis parti du Devoir en 1977 pour y revenir à la fin de 1978, après avoir fait un an au Jour Hebdo. »


De CROC…

Et ces nombreux passages d’un journal à l’autre ont amené Bado à rencontrer plusieurs artistes et dessinateurs.

Parmi ces rencontres, il se rappelle très bien celle qui a réuni autour d’une même table quelques-unes des personnes qui ont fondé le magazine humoriste CROC.

Avec Pierre Huet et de nombreux autres, Bado en fut un des premiers collaborateurs. Les premiers dessins publiés dans CROC furent les personnages de la série Les Gagas, qu’il a fait vivre pendant deux ans.

« Cette aventure a débuté en 1979, explique-t-il. Ce fut une grande expérience de participer à la création d’un magazine qui aura marqué le Québec, au final. Mais, malgré la passion qui m’habitait à ce moment, il fallait bien que je gagne mieux ma vie et j’ai donc décidé de quitter le magazine. »


… au Droit

C’est à ce moment que l’opportunité d’un emploi au Droit s’est présentée. Le jeune caricaturiste n’a pas raté cette chance.

« Ma carrière a vraiment décollé à mon arrivée au journal en 1981, confie-t-il. Aujourd’hui, 40 ans plus tard, je ne peux qu’être fier de ce que j’ai fait, malgré que je n’ai pas toujours aimé les dessins que j’ai publiés (encore des rires). »

Quand on lui demande de quel dessin il est le plus fier, il dit sans hésiter « Le raciste, c’est l’autre. »


« C’est un dessin qui a été fait pour souligner la Semaine d’actions contre le racisme en 2007, se souvient-il. On y voit des gens de toutes les ethnies qui se pointent du doigt en disant que c’est l’autre qui est le raciste. Ce dessin fut un très gros hit. J’en suis très fier, même si Sylvie (sa conjointe) dit que c’est elle qui a trouvé le gag (encore plus de rires). »

Parmi les personnages publics qu’il a adoré dessiner, Claude Ryan vient en tête de liste.


« Je vouais presqu’un culte à Claude Ryan, blague-t-il. En plus de m’avoir licencié lorsque j’étais au Devoir, il est franchement quelqu’un de très inspirant à dessiner. La main de Dieu est sans doute l’image qui nous restera de lui, sans parler de sa physionomie très particulière… 


10 000 dessins

Au fil des années, Bado a publié de nombreux ouvrages regroupant ses dessins.

Il a publié 12 recueils de ses caricatures sous son nom, en plus de 24 éditions du Portfoolio, une série de livres dédiée à la caricature au Canada. D’ailleurs, l’ancien premier ministre du Québec, René Lévesque, a même préfacé une des éditions, celle de 1985.

Si l’inspiration demeure, l’artiste et commentateur de l’actualité pourrait bien atteindre le chiffre de 10 000 dessins au cours des prochaines années.

« J’aimerais bien me rendre à ce chiffre, espère-t-il. C’est énorme et pour se rendre là, il faut savoir se renouveler et trouver de nouvelles idées. »

Mais pour le dessinateur, la retraite n’est pas une option.

Lui qui voue une grande admiration à Sempé qui est toujours actif à 89 ans — et qu’il a d’ailleurs rencontré à Paris — espère offrir ses coups de crayon encore longtemps.

« Il y a toujours moyen de faire des blagues avec n’importe quoi, conclut-il. Donc, je pourrais être ici pour encore bien longtemps. »

***

Plusieurs de mes confrères ont été sollicitées par l’équipe des arts du Droit pour souligner cet anniversaire et ont répondu à l’appel.

Bado vu par André-Philiooe Côté



Bado vu par Jean Isabelle




Bado vu par Christian Quesnel



Bado vu par Patrick Chappatte

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