vendredi 19 janvier 2024

IA au lieu de BA pour l'Association des Scouts du Canada

Sur la page Facebook de Pascal Colpron.


J'ai jamais fait le calendrier scout mais je trouvais ça génial qu'ils emploient à chaque année des illustrateurs québécois qui y mettaient leur touche toute personnelle. 

Cette année, pour le calendrier 2025, l'Association des Scouts du Canada a choisi d'encourager quelqu'un qui génère ses images par intelligence artificielle.


C'est léché et tout à fait banal comme style. Artificiel. Rien d'audacieux, de mûri. Et l'illustrateur doit être bien content d'avoir eu la job aussi facilement.

Je me dis qu'une opportunité que ce calendrier offrait depuis quelques années, c'est d'éduquer le grand public sur les talents d'ici, sur les riches possibilités de l'illustration.

Cette année, ils ont raté leur B.A.

MISES À JOUR


Catherine Lalonde dans Le Devoir:

Le calendrier des scouts 2025 presque illustré grâce à l’IA

Le calendrier des scouts fait depuis plusieurs années la joie des illustrateurs. 

Pour l’artiste qui a la chance de pondre les 13 créations qui le constituent, c’est un contrat en or. 

Une grande visibilité — grosso modo 70 000 exemplaires dans le Canada francophone —, une liberté de création, et des conditions financières parmi les meilleures chez les illustrateurs. 

Félix Girard signe d’ailleurs le calendrier 2024.


Mais pour 2025, l’Association des scouts du Canada a voulu donner la chance à toutes « les personnes ayant des habiletés créatives de postuler »

Elle avait d’abord choisi Marteen Trepaniez, un artiste aux racines micmaques qui utilise largement l’intelligence artificielle (IA). 

Tollé chez les illustrateurs. Jusqu’à faire reculer l’association vendredi.

« À la suite de la controverse entourant l’IA, l’Association des scouts du Canada a choisi de ne pas utiliser cet outil pour la création de nos prochaines illustrations. 

Nous ne poursuivrons pas notre partenariat avec l’illustrateur qui avait été choisi », a annoncé le mouvement scout après une semaine de débats sur les réseaux sociaux. 

De nombreux commentaires — dont plusieurs signés par des illustrateurs — ont salué la décision.

Plus tôt cette semaine, ils étaient plus nombreux à signaler la grande utilisation de l’IA dans le travail de M. Trepaniez, à s’en insurger et à même douter de son parcours artistique. 

« Sa page Facebook n’existe que depuis la mi-décembre, et il n’y a pas d’oeuvres sur Google lorsqu’on fait une recherche à son nom », a indiqué par exemple en commentaire l’illustrateur Alex S. Girard (Les Phylacterribles), sous une publication que l’association a effacée depuis.


Création assistée, création générée

« Pour créer mes illustrations, je suis un processus en plusieurs étapes qui intègre à la fois la technologie et les compétences artistiques, prenant généralement 10 à 20 heures par image », expliquait M. Trepaniez vendredi sur sa page Facebook.

Il dit d’abord faire un croquis ou prendre une photo, puis utiliser l’IA pour générer une première image illustrée. 

Les interventions suivantes se font par des applications d’édition graphique comme Photoshop, Procreate et Illustrator. 

En survolant les photos de sa page Facebook, on voit clairement la différence entre ses peintures faites à la main et les illustrations retravaillées par l’IA.

« C’est vraiment difficile pour moi de croire qu’il y a là du travail artistique, explique le bédéiste et illustrateur Jean-Paul Eid (Le petit astronaute, Le fond du trou). 

Ses images ressemblent étrangement à celles de Marcel Marlier, vous savez, les livres Martine, pour les jeunes ? »

M. Eid poursuit : « Il y a peut-être là du travail de programmation, une capacité à dire les bons mots à l’IA pour qu’elle génère ces images. 

Mais il n’y a visiblement pas de contrôle sur le dessin. Pour moi, ce n’est pas de l’art. »

Le comité sur l’IA d’Illustration Québec est intervenu pour sensibiliser et instruire les scouts au sujet de l’utilisation de l’IA et de ses conséquences, explique André Martel, illustrateur et membre de ce comité, qui existe depuis un an. 

Ce que confirme Vincent Duval, chef de la direction de l’Association des scouts du Canada. 

« Nous, on était rassurés par la démarche de M. Trepaniez. 

La controverse, la mobilisation des illustrateurs, nous a surpris. Mais on est un mouvement, les scouts ; on est toujours prêts à apprendre. »

« On va poursuivre les discussions pour baliser notre utilisation de l’IA, pour savoir comment le faire d’une façon éthique. 

On comprend aussi que les gens nous voient en porte-étendard de certaines valeurs. C’est une haute estime. 

On a vu cette semaine que ça venait avec une grande exigence, parfois surprenante », soutient M. Duval. 


Changer de façon de faire

« On voulait cette année changer la manière de faire le calendrier, s’ouvrir à des créateurs émergents, qui travaillent avec des outils différents », explique Vincent Duval. 

Après un sondage interne sur une douzaine de dossiers sans nom de créateur ni CV, le choix de l’Association des scouts s’était porté sur Marteen Trepaniez.

« On a une relation de confiance depuis longtemps avec les illustrateurs professionnels, rappelle M. Duval, qui ont eu une réaction épidermique. »

Est-ce que la perte d’un précieux contrat, par son ouverture aux non-professionnels, peut être une raison de la vivacité de cette réaction ? 

Est-ce que l’Association des scouts aurait eu avantage à demander à des yeux plus aguerris artistiquement de participer au sondage ? 

Chose certaine, il y aura un calendrier scout 2025, confirme M. Duval. 

« On va voir la semaine prochaine comment on se retourne. Et si on peut conserver notre désir d’explorer de nouvelles avenues. »

Marteen Trepaniez a décliné la demande d’entrevue du Devoir.

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