dimanche 25 octobre 2020

Publier des caricatures : le jeu en vaut-il encore la chandelle ?

 Sur le site de Courrier international.


Suite au meurtre de Samuel Paty, à Conflans-Sainte-Honorine, la presse internationale s’interroge : doit-on encore prendre le risque de caricaturer Mahomet ? 

L’hebdomadaire britannique The Guardian et la revue italienne Formiche ne sont pas du même avis.

NON

Une question de sécurité et de respect

“Si possible, mieux vaut une caricature en moins.” La prise de position de la revue italienne Formiche est nette. 

Publier des caricatures de Mahomet ? Le jeu n’en vaut plus la chandelle. 

“Nous sommes arrivés à un point critique. La liberté d’expression en démocratie est sacrée, mais la satire ne doit-elle pas se poser elle-même des limites ? Je dis bien se poser et non pas les subir. Des limites, ce qui ne veut pas dire de l’autocensure.” 

Il s’agit là d’une question de sécurité, de réalisme face à une situation devenue périlleuse, mais aussi de respect envers les musulmans : “Il faut tenir compte de la sensibilité des pratiquants de toute religion, car ce qui pour nous est de la satire, pour d’autres correspond à de la simple provocation.” 

Quant à l’auteur des vignettes en question, Charlie Hebdo, “son interprétation de ce qu’est la satire” paraît à Formiche assez singulière. 

Ils avaient représenté les [près de 300] victimes du tremblement de terre de 2016 à Amatrice comme des lasagnes. Un choix ignoble.”





OUI

Le droit de choquer est nécessaire

Dans le sillage de ce genre d’attaque, “il y en a toujours pour affirmer que ‘la liberté d’expression n’en vaut pas la peine’”, constate le journaliste britannique Kenan Malik. 

Une posture regrettable, assène-t-il dans The Guardian. 

“Dans ces moments-là, il nous incombe de faire le contraire, c’est-à-dire de défendre la liberté d’expression et la liberté d’​offenser.” 

Selon lui, “ce qui est appelé ‘outrage à une communauté’ cache souvent des dissensions au sein même de ces communautés”

En refusant de défendre les principes de liberté fondamentaux, certains à gauche trahissent “les progressistes au sein des minorités et encouragent ainsi les réactionnaires”, assure Kenan Malik dans les colonnes de l’hebdomadaire orienté à gauche. 

“Plus la société entérine l’indignation, plus il y aura de gens pour se dire indignés, et plus leur indignation sera meurtrière.” 

Dans le même temps, “cette lâcheté est un moteur de l’islamophobie car elle alimente l’idée raciste selon laquelle tous les musulmans seraient réactionnaires”

Et de conclure : “Nous devons rejeter les obscurantistes des deux camps. Dans une société plurielle, quasiment tout ce qu’on dit est susceptible d’être choquant pour quelqu’un. Si nous voulons une société plurielle, nous devons défendre la liberté de choquer.”




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